Personnellement, j'ai un peu de mal à cerner le projet de ces énergumènes en civil. J'ai juste quelques impressions.
Pour les bars qui arrêtent à cause du fric, ok c'est leur droit, même si je doute fort de la sincérité de la moitié d'entre eux. Il est rare qu'une jam manouche soit déficitaire, en valeur ajoutée. En tous cas dans les endroits que j'ai pu fréquenter. La plupart cherche ensuite de nouveaux musiciens qui prennent encore moins cher, quitte à jouer moins bien. Stratégie qui a ses limites.
Quant au poivrot qui se promène rue oberkampf avec son compteur à décibels, j'ai eu l'occasion de l'observer. Ce soir là, au Styx, il y avait Mika et Romain je crois qui étaient en train de jouer quand le gars se ramène, fait son numéro avec son joujou électronique, mais on avait déjà coupé l'amplification, dès qu'on l'avait repéré. La jam s'interrompt.
A un moment, le keuf se plante devant Mika qui continuait à jouer en acoustique tout seul sans lui prêter la moindre attention, ce qui avait l'air d'ennuyer le pauvre mec qui, ne sachant plus que faire, feignait de le regarder jouer admirativement tout en cherchant ses phrases (le flic, pas Mika hein
Le mec voyant que Mika n'était pas impressionné par sa présence, essaye de s'imposer :
- Vous jouez trop fort, là.
Mika, sans s'arrêter de jouer : - Non non, pas du tout.
Keuf : - Si, c'est vrai. Il faut baisser le volume.
Mika : - Allez-y, baissez le volume si vous voulez, c'est pas branché.
Le mec se démonte pas malgré le ridicule (je rappelle qu'il est de la police)
- Oui mais vous comprenez, les voisins, il y a des plaintes etc...
J'étais en train de les écouter en me marrant bien, quand le keuf prononce une phrase sur l'air de "soit dit en passant" :
- Vous savez, on veut pas vous empêcher de
travailler, hein.
J'ai vu qu'il fixait Mika en attendant une réponse. Mika lui a répondu par un petit triolet de croches qui n'a apparemment pas satisfait notre policier mélomane.
J'ai eu l'impression, à ce moment-là, que c'était ça qui le dérangeait, et que justement, il voulait nous empêcher de travailler. Il se trouve que ce soir-là Mika était venu boeuffer pour le plaisir comme quinze autres collègues, et que le type cherchait visiblement, avec son bluff à deux francs, à se renseigner sur les (maigres) histoires d'argent qu'il pouvait y avoir derrière.
Le mot "travailler", dans la bouche d'un flic, ça signifie d'habitude casser des cailloux, casser de l'étudiant, ou ce que vous voulez mais pas casser des cordes. Il y avait une intention de flatter derrière dans un but pernicieux ou alors ma mère c'est biréli.
C'était il y a six mois. J'ai une forte impression aujourd'hui, que le travail de ce petit soldat, c'est de casser le "système" en place de musique dans les bars. Ou de faire une sorte de ménage. Pour l'instant c'est surtout le jazz manouche, j'ai l'impression, qui trinque. Je ne comprends pas bien pourquoi. Est-ce que cette tendance est la même dans les autres styles de musique ? Dans les autres villes de France ? Merci pour vos témoignages, histoire de cerner un peu mieux l'ampleur de leurs ambitions.
En tout cas, je sais que l'animal a fureté aussi au Chiquito qui, s'il n'avait pas arrêté à cause du fric, n'aurait pas tardé à avoir les mêmes problèmes. Et d'après Mathieu, il est venu aussi le mardi au Lou Pascalou (déjà !).
Le moins qu'on puisse dire, c'est que le cas n'est pas isolé.