Conseils
Ces conseils viennent de mon expérience personnelle, donc c'est bête à dire, mais ils s'appliquent surtout bien pour moi. Peut-être avez-vous une façon de faire différente qui marche mieux pour vous et dans ce cas tant mieux. Ces conseils me semblent malgré tout représentatifs et relativement universels, puisque ils fonctionnent pour la plupart des bons musiciens que j'ai rencontrés. Bref, je n'ai pas sorti ça de mon chapeau magique...
La musique manouche ne se différencie pas trop des autres styles de musique en ce qui concerne la façon de travailler. Elle tient dans les mots-clés suivants
Il est à mon sens indispensable pour progresser d'appliquer ces règles.
Patience
La patience est la vertu principale nécessaire pour apprendre le style, et d'autant plus si l'on a joué longtemps de la guitare dans un autre style. Il faut accepter de repartir de zéro et tant pis si l'on n'arrive pas à sortir les mêmes solos que l'on joue sur l'électrique ou sur la folk. C'est frustrant au possible mais il faut se mettre en tête que l'on est débutant absolu à la main droite et on doit savoir que ça prendra du temps. Passer de la main posée sur la table à la main détachée est une expérience qui apporte une bonne dose d'humilité! Quoi qu'il en soit, avec un travail régulier et une bonne méthode, au bout de quelques mois déjà, on peut commencer à trouver la position naturelle, au point qu'on envisage de l'utiliser sur les autres styles de guitare. Enfin, moi ça me fait ça...
Régularité
Le travail doit être régulier. Il vaut mieux travailler tous les jours une demi-heure que douze heures une journée par mois. C'est la répétition des gestes qui fait qu'ils seront assimilés par le cerveau et les muscles. De mon expérience personnelle, travailler une heure par jour tous les jours permet déjà d'obtenir des résultats. C'est ce que j'ai fait l'année passée de juillet à octobre, tous les jours entre une et deux heures, et quelques fois le week-end, des journées à quatre heures de guitare. C'est sûr qu'il faut être un minimum disponible et qu'un travail ainsi qu'une vie de famille posent des contraintes qui peuvent sembler décourageantes de prime abord. Mais je répète qu'une heure par jour tous les jours donnent déjà des résultats visibles. Une heure par jour, ça se trouve: il suffit par exemple de ne pas regarder la télé ou de bosser entre midi et deux dans la voiture (c'est ce que j'ai fait)! Avec l'aide du métronome, on se rend vite compte que les progrès d'une semaine sur l'autre sont visibles et là, c'est très encourageant.
Méthode de travail
Comme pour les autres styles de musique, il faut faire une distinction très nette entre jouer pour s'amuser, sans objectif, et travailler l'instrument. Ca n'a rien à voir. Travailler, c'est toujours dans le sens de vouloir progresser. Il faut donc se fixer des objectifs qui soient d'une difficulté abordable. Des objectifs trop difficiles à atteindre entraînent beaucoup de frustration et sont souvent le signe d'un manque de patience. En guitare manouche, il existe une multitude de choses à travailler: essentiellement la technique de main droite bien sûr (surtout pour les guitaristes aguerris dans d'autres styles) mais aussi la main gauche, l'harmonie, les accords typiques, les ornements, les arpèges, les plans, la liste est longue...
Idéalement, il faut être capable de s'auto-évaluer pour savoir si l'on progresse ou pas. La solution est toute trouvée: le métronome. En ce qui me concerne, j'ai acheté un métronome pour la première fois de ma vie l'été dernier, pour apprendre la guitare manouche et franchement, je ne le regrette absolument pas. On peut aussi trouver des logiciels de métronome gratuits sur l'Internet: Celui-ci m'a été particulièrement recommandé et en effet il semble bien faire l'affaire. En fait, outre le fait que l'on peut travailler la justesse et le placement rythmique, on peut aussi évaluer ses progrès grâce à cet outil. C'est très encourageant de voir que l'on passe un plan proprement à 2-3 bpm de plus que la semaine précédente. C'est même une façon très efficace de s'encourager.
Une fois le métronome en main, il faut impérativement travailler à un rythme où ce que l'on veut jouer est propre. Le cerveau a besoin de comprendre, de décomposer un geste pour l'assimiler, les muscles ont besoin de construire de la fibre musculaire pour être physiquement capable d'accomplir tel ou tel geste avec la précision nécessaire. Une fois le geste enregistré - on estime qu'il faut répéter le geste 100 à 200 fois sur plusieurs jours - on peut augmenter la vitesse. Travailler à des vitesses trop grandes, c'est généralement apprendre à faire les mêmes erreurs mais à un rythme plus élevé. Comme on dit, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Le secret des gens qui jouent vite et proprement, c'est ça: travailler à une vitesse adéquate. Vouloir aller trop vite, c'est encore faire preuve de manque de patience et ce n'est pas bon. On croit aller plus vite mais ce n'est qu'une impression. Au contraire, on est moins efficace et au final, il faut plus de temps pour apprendre le même geste. Ma façon de faire, c'est d'apprendre un nouveau geste très lentement et une fois que je le tiens, j'accélère le métronome de 5 bpm en 5 bpm jusqu'à ce que je n'y arrive plus. Une fois la limite atteinte, je reviens quelques bpm en arrière et je travaille à ce rythme. En faisant ça, on voit des résultats d'une semaine sur l'autre, parfois d'un jour sur l'autre (véridique). Je continue d'ailleurs de travailler comme ça. A chaque changement de vitesse, c'est un point spécifique de la technique de main droite qui coince et on travaillera particulièrement ce point.
Pour travailler spécifiquement la main droite, j'ai commencé par apprendre l'aller-retour sur une corde avec la position typique du poignet, c'est-à-dire bien détaché de la table. Puis sur plusieurs cordes à 4 notes par corde. Il m'a fallu plusieurs jours pour y arriver, et encore très lentement. Puis, j'ai essayé quelques changements de corde et des plans typiques que je jouais à une vitesse très lente (par rapport à ce que je faisais sur ma Takamine). Toujours légèrement en deça du maximum pour apprendre le geste. Par contre, souvent au cours d'une séance, je travaille un ou plusieurs plans à 100-110% pendant quelques minutes, tant que ça reste propre ou à peu près, histoire de faire bosser les muscles et les nerfs de façon plus tendue: une journée après, on peut sentir les bénéfices de ces petits coups de speed.
Les thèmes à travailler particulièrement sont les gammes, les arpèges, le jeu en allers-retours, les changements de corde avec plusieurs coups consécutifs vers le bas. L'objectif final, c'est de passer tous les plans avec une main droite aussi détendue que possible.
Pour travailler l'impro, il faut avant tout avoir quelque chose à dire, donc écouter, écouter, et écouter, intérioriser, assimiler, intégrer, avoir quelque chose à chanter en somme. Les techniques de gamme et d'arpège sont des outils qui sont au service de la mélodie intérieure. Il ne faut pas faire des gammes juste pour faire des gammes, l'idée c'est de rester musical: écoutez Django. Mais avant tout, écoutez... tout court.
Ecoute
La musique est avant toute chose une question d'écoute, et particulièrement dans la guitare manouche où la tradition est essentiellement orale. Pour jouer dans un style, il faut en connaître au moins les rudiments et ensuite s'imprégner. C'est exactement comme une langue, il faut un vocabulaire de base pour se faire comprendre et la meilleure façon d'acquérir vite ce vocabulaire est d'aller dans le pays où cette langue est parlée. Le pays de la musique manouche, c'est le CD, les concerts, les jams, les rencontres avec des musiciens, avec des mélomanes. Toutes les occasions sont bonnes pour en écouter. La façon la plus simple de procéder, c'est d'écouter les maîtres du genre, Django Reinhardt, Boulou Ferré, Angelo Debarre, Tchavolo Schmitt, Dorado Schmitt, Biréli Lagrène, Yorgui Loeffler, la liste des musiciens est très longue et chacun a sa propre personnalité... Ma façon de faire, c'est d'écouter un CD en particulier pendant une certaine période de temps, genre une semaine, dans la voiture en allant travailler le matin et en rentrant le soir et de réécouter avec attention certaines parties (des bouts de solo, la pompe, les ornements, etc...) puis pourquoi pas, quand la tentation est forte, de prendre la guitare directement une fois à la maison et d'apprendre tout de suite ce qui nous a tapé dans l'oeil. Personnellement, je fonctionne beaucoup comme ça: j'écoute et dès que j'entends quelque chose que je n'avais jamais remarqué avant, je tente de l'apprendre si je peux le faire.