Alex, je me suis coltiné des bandes de loulou des cités à moi tout seul quand j'étais jeune,quitte à aller jusqu'au vrai coup de poing et crois moi c'était pas des tendres surtout les chefs de bande.
Pas trés déontologique, mais ils aiment ceux qui ont des couilles , alors ensuite on a pu vivre des trucs fabuleux mais exigeants ensemble. Les Éducateurs comme ça ça n'existe plus aujourd'hui, on met des flics à la place et on remplit les prisons...
Je met une de mes petites chose pour Dani et pour ceux qui aiment "faire leurs preuves"
mais que je ne mettrais pas dans ma cordée parce que je ne suis pas fou

MONTE AGNER
Cette passion m'a un peu détourné de ce que j'aurais aimé mieux faire à la guitare c'est vrai...
Mais c'est comme ça dans la vie, il faut faire des choix.
Ça donnera un peu d'oxygène alentour, d'ailleurs je vais refaire un blog pour faire connaissance
Pis c'est pas pire que les insultes d'un trou de balle qui pense avoir bouclé ma vie ratée en 18 ans
Une parmi environ un millier d'autres... mais une parmi les plus monstrueuse que j'ai gravies...

Mon Récit d'une grande course dolomitique ( Italie du nord) : EL MONTE AGNER
Aout1996
G.Alain-Pierrot P.
Longtemps rêvée de cette paroi gigantesque des Dolomites Italiennes, elle est aujourd'hui à ma portée, c'est une affaire d'alpiniste dans la maturité.
Du haut de ses 1600 m de paroi ininterrompue, immense bastion unique en Europe "équipé" à l'ancienne tout au long de l'année je l'avais en tête.
L'entraînement à Fontainebleau dans cette perspective enthousiasmante...
Gravie par nos anciens...c'est à mon tour de lui chatouiller les flancs.
"Monte Agner"...une des cimes calcaires les plus colossales de la planète en ce royaume magnifique des Dols pas trés loin de la "Civetta" (non moins mythique:5 kms de parois, des murs de 1000 à 1200m sur deux faces).
Un jeune garçon de mon club qui était associé au projet, avec lequel cette ascension était programmée....déjà éprouvé par les courses trés difficiles de préparation...Ce jeune ami est resté suspendu plusieurs heures dans le vide ne pouvant plus passer...
Je suis descendu le chercher puis nous avons bivouaqué...Le lendemain nous sommes sortis (Pilastro di Rozes ED 900m) Il a pris peur et a eu le courage de me dire qu'il renonçait à deux jours du jour J.
Je l'ai remercié, l'ai consolé...je préférais cela que de le conduire à rebrousse poil... Ce vieux Pierrot(56 ans) voyant mon désarroi pris son courage et son envie à deux bras et s'est proposé comme second, mon sourire est soudain revenu...Ha! ces vielles bêtes de montagne!
Cette ascension se conçoit comme une expédition. Sa dimension, même si l'escalade n'y est pas souvent extrême, en fait, de par sa longueur, une très sérieuse entreprise.
Cinq tours Eiffel empilées classifiée très difficile supérieure.
La motivation, la détermination et la condition physique doivent être au rendez-vous.... Une fois engagé là- dedans, c'est en haut que se trouve le salut.
Renoncer à mi-parcours signifie 14 à 16 heures de repli, de descente en rappels aléatoires et de dé-escalade périlleuse (vécu à ma première tentative à cause du mauvais temps )...
Avec 17 kgs de bouffe d'eau et de matos à traîner...L'ascension est prévue en deux jours. 900m puis 600m.
LE MATERIEL / doit être étudié au millimètre
-corde de rappel:100m
-sangles de toutes tailles (surtout pour la retraite éventuelle, le temps en cette fin de mois d'Août étant très incertain...)
problème récurant des Dols avec ses orages fréquents, soudains et fulgurants....bonnes ou mauvaises années ça dépend....cette année là était mauvaise...(il faut faire avec ou sans).
C'est se qui s'est passé à notre première tentative..14 heure de descente, 25 rappels parfois crées de toute pièce sur un piton unique + une branche, manœuvrant en silence, solidaires pour aboutir avant la nuit...descendant sans heurts en priant que ça tienne ...que la corde obéisse...puis « terre ! » une demie heure avant la nuit...ouf...Un repli... aventure fantastique en soi..
- 15 dégaines (30 mousquetons) équipées traditionnellement mais aussi pour certaines, reliées par de la cordelette (ficelles du métier, autre recours en cas de disette de matos).
- Pitons (un assortiment), marteau : incontournable...il s'agit d'un terrain d'aventure,pas de place pour les amateurs de voies pré-mâchées en ces lieux...
- Baudriers complets
- Descendeurs, bloqueurs.
- « Friends » quelques-uns et autres "bricoles"...
- Casques, lunettes, frontales (deux) avec piles neuves et de rechange (ça n'a l'air de rien mais...)
- Alti, vrai duvets, l'option bivouac de fortune étant d'emblée à écarter...
Après 900m de bagarre, il s'agit d'avoir chaud et de récupérer. Entre ça et une «doudoune » pour 500grammes de différence, pas d'hésitation...En cas de pluie , je me suis confectionné une bâche,un concept à moi,simple bâche de supermarché en plastique vert et bleu qui en a fait baver plusieurs lors de bivouacs,chacun de ses œillets est équipé d'un morceau de chambre à air, pour la souplesse au vent, prolongées par des fils de nylon soigneusement pliés, permettant de se faire ainsi un abri dans toutes les conformations de parois et d'emplacements de bivouac...voire même de s'envelopper à deux dedans, hors pluie neige et gel: 3 m sur 2 m, léger, sacs et vêtements isolants du sol...Le Bivouac est prévu après 900m de paroi.
- Bien-sûr, fourrures polaires, Gortex, chaussettes et maillots techniques pour le change...
Chaussons d'escalade pas trop serrés et « portant » et chaussures légères à semelles crantées extrêmement recommandées pour la descente et le névé qui est là incontournable et rendrait sa traversée très aléatoire ou impossible en chaussons si la neige était gelée le matin....
- Problème avec l'eau, il n'y a pas une goutte d'eau dans cette paroi...9 litres d'eau pour deux pour les soupes, les déjeuners.
Malgré cette quantité d'eau on sait qu'on aura très soif...et qu'on finira sans eau...sauf au sommet où on pourra faire fondre de la neige...tout ce poids se libèrera au fur et à mesure de l'ascension.
- Enfin, la bouffe,...gamelles, bleuets, gaz...vivres sèches, pâtes d'amende fruits secs and co ...Je vous passe les détails mais chaque repas est prévu, de vrais repas, il le faut, mais juste ce qu'il faut, étudié, pesé...en vue de réduire au maximum la part d'aléas, de poids superflu...cet ennemi de toujours. Et mille et autres détails calculés évalués comptés...
- Postes émetteurs récepteurs (walky-talkies), réveil, briquets...pour le contact avec les copains dans la vallée en cas de pépin et pour être tenu au courant de l'évolution météo à heures fixes (si un rendez vous est loupé c'est qu'on est en bagarre)...
Topos officiels...vaseux...et celui fait par notre bible vivante de l'alpinisme Françis Bocianowski, maitre des lieux...des monolithes de la Seine et d'Etretat...il a côtoyé les plus grands Terray, Bonnati, Paragot, Livanos...Fressinay et Nano le funambule...jean Vic...et tant d'autres...Le club RSCM de Montreuil sous Bois (93) a initié Christophe Profit avec nous à ses débuts (il avait 16 ans un extraterrestre).
Mais chez nous aussi il y a eu des géants...ces pionniers de la FSGT, ces Blausards qui ont damné le pion aux Savoyards. En ces temps ou on grimpait à Bleau en Vibram venant en train à l'aube et traçant à la craie les premiers circuits en s'écartant des randonneurs pour investir ces nouveaux terrains de jeu...
J'ai été formé à cette école là...tu parlais d'autre chose que de la grimpe...ils se retournaient...tu te taisais...c'était une religion ...eux des yogis...du haut de mes 20 ans doucement j'ai appris...
C'était des grands...Trivellini (première du Linceul,mort dans l'Ogre Suisse (l'Eiger),Carpentier gilbert,Patrice Krier, Meyer Pascal, Michaud Alain maitre bleausard entre tous tatoué « ni dieu ni maître »...les Affanasiefs, Destivelle Catherine qui fit ses premiers glaciers avec Claude...bref...j'en oublie de nombreux et pas des moindres...c'est l'objet d'une bible à écrire...
APPROCHE /
Enfin nous étudions l'itinéraire une dernière fois... petites conférences avec les anciens... leurs souvenirs de certains passages clé...
Puis...
16 à 17 kgs chacun au départ...Nuit au pied du monstre dans la vallée dans le « combi » de Pierrot.
Deux heures du mat : steak, pâtes, café, biscuits...et autres...bien manger,sans faim, mais manger...
Quatre heures de marche d'approche à la frontale, ce monstre semble si près...
Avec ce sac sur le dos on se demande encore dans quelle galère on est en train d'aller se fourvoyer, le corps chauffe, se réveille les ronces et branchages agressent mais la volonté est là, dure, déterminée, la viande est en route...déjà on gère l'effort,on pose le pas..
A la pointe du jour, nous sommes au collet et, un signe repéré, vaguement cabalistique, là où il devait être nous indique que le départ est là...Le jour n'est pas encore levé...
Une demie heure d'attente, nerveux, silencieux...on se refroidit...on s'équipe enfin...
LA VOIE /
J'engage...
Les premiers cinq cent mètres de ce ressaut sont le pied du monstre et n'est pour ainsi dire pas équipé et c'est déjà du IV+..aller chercher les arbustes qui sont désespérément trop éloignés sur les cotés pour faire des points serait une perte de temps...alors on continue jusqu'aux relais...longueurs de solos, mais des relais...pas de clous le rocher est humide, moussu...on peste ..putains les salauds ! Ils n'ont rien mis !...eh oui...comme nous, ils n'ont rien trouvé et pris dans la gestion du temps et la relative faiblesse de ce premiers ressaut (le socle), il ont du gueuler aussi...on fait gaffe ...on reste concentrés...déjà aucun droit à l'erreur...nous veillons à ce que ces sacs trop lourds ne nous jouent pas un tour de con...La paroi se couche enfin un peu...Pierrot me dit:
« j'avais peur de te prendre sur la gueule »...première terrasse dans les herbages 500m plus bas , la vallée...nous sommes déjà au bout du monde, seuls...
On prépare le repas de midi...on choisit le plus lourd...on repose notre corps déjà éprouvé...on plaisante un peu...on est deux, lancés dans cette aventure...le temps est gris...ça n'augure rien de bon...
Recherche de l'attaque du deuxième ressaut, caché à l'Ouest au flanc de cette immense arrête qui commence...Trouvé !
L'escalade est sérieuse, rocher pourri mais il y a quelques clous...pas le choix (tu m'étonnes )...en fait ça tient...on prend pied sur le fil de l'arrête...on s'élève de longueur en longueur, escalade aérienne puis complexe...dans quelques passages de V et VI on s'en gage « nus » puis on fait suivre les sacs...encore une heure de jour....900m d'escalade...on est « nazes »...le vide est vertigineux et les premiers 500m sont déjà tassées par la perspective. Une immense voie gravie et nous ne sommes qu'à mi parcours...Dans un endroit plat on installe un excellent bivouac...la nuit il pleut quelques heures...au matin, c'est inestimable, nous avons pu dormir quelques bonnes heures...c'est mouillé...Nous restons là et nous nous accordons quelques heures de réflexion en pliant le bivouac...décider...déjà 25 longueurs de corde effectuées sur les 53 que compte la paroi...Les copains nous disent que les prévisions sont incertaines...
La décision est prise, périlleuse, pas très raisonnable...mais tant de hargne, tant de préparation...Une immense paroi marbrée de cheminées se dresse devant nous,on maudit déjà cette radio qui nous a fait perdre une précieuse heure...
Choisir la bonne cheminée de deux cents mètres...Dulfer....puis un grand mur de trois cents mètres...Bon dieu ! Que cette montagne est gigantesque ! Plusieurs fausses vies équipées comme des leurres menant à des culs de sac....des gars ont planté des clous pour faire marche arrière...
L'option est prise...grâce au topo des anciens elle est juste !
Les efforts de la veille pèsent lourdement...les sacs sont un peu moins lourds 14/15 kgs...
Les mains sont zébrées de sang...ça bosse...ça besogne...
Pierrot tient le coup, je le rappelle à la vigilance et moi à la mienne dans les pas difficiles , le fatigue fait son œuvre...il est là cette vieille bête...un diesel...à 14 heures on atteint le troisième ressaut la cheminée empruntée devait être la bonne...on ne sait pas... peu importe....c'est dément et magnifique, e vide est effroyable, la paroi s'est raidie mais le rocher est meilleur...quelques crampes apparaissent...les toxines s'accumulent, les mains se gonflent...l'eau se fait rare...Ce replat sur lequel on se restaure nous donne l'illusion de la terre ferme mais cette arrête verticale de quatre cent mètres qui nous domine encore nous dit : « Eh non ! vous êtes cramés mais ce n'est pas fini ! »
Mécaniquement, à contre cœur, on se remet en grimpe, passages athlétiques mais courts, en surplomb agrémentés de quelques bons clous on les double par des
« coinceurs » par conscience de notre fatigue ou pour se donner bonne conscience au choix...on est fondus dans cette montagne, notre sort est au bout de nos doigts de nos pieds...pas eu le temps, le moral de faire des photos...c'est le baston final...mes mains se ferment toutes seules dés que la grimpe cesse...et je dois ouvrir l'une avec l'autre par instants...(je repense à Nano qui me racontait qu'il avait du attacher ses doigts pour les garder ouverts... putain ! Se reposer au relai pour faire venir son compagnon devient une corvée épouvantable...le corps se refroidit...le nylon de la corde tant de fois avalée est une blessure, une brûlure...chaque mètre gagné devient une petite victoire...et c'est Pierrot qui arrive...un peu de tirage et c'est un effort de plus...une soif de plus...la bouche est sèche et le recours n'est plus que ces fruits secs qui font saliver un peu mais ne passent plus...on a paumé deux dégaines...bof...elles ont glissées...offrande au monstre...encore 10 longueurs...10 longueurs...les plus dures...(« Il y a un « pet » en dessous ! »)...un gaz monstrueux...on a l'habitude pourtant, comme une seconde nature, mais là...quel précipice...
On ne se parle plus...grimper, s'élever,, se dresser...verrouiller...à l'énergie, aux tripes...avec cette envie de s'arrêter mais cette interdiction...continuer...sortir !
Quelles ressources ne trouve–t-on pas en soi...on les ignore hors de telles circonstances...
Enfin, sans joie immédiate, en fin de soirée, on sort des difficultés..
On se regarde, les visages défaits ...avec cette lueur naissante...le temps à tenu...
Une longue traversée vers cet abri en tôle au sommet perché au dessus du névé...Il fait nuit, un effort du diable pour faire fondre de la neige...boire....puis boire une soupe et sombrer...
Demain la descente de l'autre côté...vigilante mais le cœur en joie...et les copains en bas.
Quelle voie ! On se tape enfin dans le dos ! Un grand sourire de joie et d'accomplissement ensoleille nos yeux fatigués.
Bravo mon Pierrot ! Une grande de plus ! YAHO !